Écologie, démographie et biologie de quatre populations de Mannia fragrans (Balb.) Frye & L. Clark dans la haute vallée de l’Allier (Haute-Loire, France) – Implications pour la conservation
DOI :
https://doi.org/10.52497/biom.v6i1.387Mots-clés :
Mannia fragrans, Habitats xériques, Reproduction végétative, Conservation des bryophytes , Perturbation des habitatsRésumé
Les populations de Mannia fragrans (Balb.) Frye & L. Clark en Haute-Loire, notamment à Blassac et à Saint-Privat-d’Allier, comptent parmi les plus importantes de l’Europe de l’Ouest sur le plan démographique, avec des effectifs élevés et de grandes surfaces occupées. Cela contraste avec des populations marginales observées ailleurs, comme en Espagne ou en Belgique. Contrairement à la plupart des populations européennes situées sur substrats calcaires, celles-ci se trouvent sur des roches volcaniques siliceuses. M. fragrans occupe des habitats de transition entre affleurements rocheux et pelouses sèches, où la compétition reste limitée et l’épaisseur du sol suffisante. Des tapis bryophytiques denses (par ex. Tortella squarrosa (Brid.) Limpr., Rhytidium rugosum (Hedw.) Kindb.) ainsi que des compétiteurs vasculaires (par ex. Centaurea stoebe L.) restreignent toutefois son développement, notamment à Chilhac. L’espèce prospère sous des conditions écologiques sévères - fortes pentes, sols peu profonds, couverture rocheuse élevée - qui limitent la concurrence. Sa stratégie reproductive est adaptée à la variabilité environnementale : les spores sont libérées au printemps et la germination se produit en fin d’été, généralement dans des microsites créés par des perturbations. L’avortement des sporophytes et la rareté des germinations indiquent des contraintes sur la reproduction sexuée, tandis que la propagation végétative semble efficace. La distribution spatiale est discontinue, probablement déterminée par des facteurs microtopographiques et par le déplacement des diaspores vers l’aval sous l’effet de la gravité et du ruissellement. Ces processus favorisent la recolonisation locale et retardent la succession. Sur le plan de la conservation, la population de Blassac demeure stable malgré l’abandon des pratiques agricoles, grâce aux filtres abiotiques naturels. À l’inverse, Chilhac montre des signes de succession et de compétition, suggérant un éventuel besoin de rétablir un pâturage. La progression d’Opuntia, encore limitée, constitue une menace latente. Un suivi continu et une gestion ciblée pourraient être nécessaires pour préserver ces habitats rares d’hépatiques.
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